samedi 31 décembre 2011

2012

Le signaleur vous annonce l'arrivée très proche de 2012 et remercie tous ses lecteurs pour leur intérêt et leur patience.
Je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année, reçue forte et claire. 

crédit j28ro.blogspot.com

Musée des Armées Lucien Roy

L'année 2011 a vu une hausse de près de 5% de la fréquentation des musées grâce notamment à un coût moins élevé que le cinéma ou les parcs d'attraction. Le 11 novembre a également été l'occasion d'inaugurer le musée de la Grande Guerre à Meaux qui comblera sans aucun doute les amateurs d'histoire militaire.

Musée Lucien Roy crédit: besancon-tourisme.com

Si ces mêmes passionnés - ou juste intéressés par l'histoire nationale - passent par le plus grand des hasards en Franche-Comté, la visite du musée des Armées Lucien Roy est un incontournable. Situé à Beure - 5kms de Besançon - et baptisé du nom d'un enfant du pays tué en 1915, ce petit musée est installé dans une maison vigneronne du XVIIIème siècle et organisé autour de 12 salles. Les matériels et documents exposés remontent de la conquête française de la région - 1674 - et couvrent le XIXème et le XXème siècle jusqu'à la guerre en Ex-Yougoslavie. Les conflits auxquels la France a participé depuis 1870 sont représentés à travers des témoignages, affiches, maquettes des champs de bataille. Plus de 200 mannequins en uniforme, de nombreux objets du quotidien évoquent le vécu des combattants, chacun d'entre eux provenant de dons et ayant donc appartenu aux acteurs de ces périodes troublées.

Plusieurs thèmes sont développés dans la scénographie, ainsi 2 salles sont dédiées aux rôles des femmes dans les conflits, mais aussi le rôle des troupes coloniales, la résistance, la déportation, etc.

musée Lucien Roy , crédit: besancon.fr
 Quelques pièces sont de vraies raretés telles que le poêle à bois du général de Gaulle à Colombey ou  l'hélice du SPAD 1916  du coéquipier de Guynemer ou enfin un maillot de corps "détricotable" pour fabriquer une corde d'évasion.
Au regard de sa taille, le musée est un peu victime de la densité des pièces présentées mais celles-ci sont le gage de l'authenticité et de l'attrait de la collection, on pardonnera donc facilement l'aspect chargé des différentes salles. 

Ouvert toute l'année sur rendez-vous aux groupes d'au moins 5 personnes. Ouvert au public de 14h à 18h le 8 mai, pour les journées du patrimoine et le 11 novembre.
Association des Amis du musée Lucien Roy
70 rue de Besançon 25720 Beure
museelucienroy@orange.fr
RDV par tél: 03 81 52 60 30

A visiter également à Besançon au sein de la citadelle le musée de la Résistance et de la Déportation .

mardi 20 décembre 2011

Filmographie indispensable (2): Frères de Sang -Taegukgi (2004)

Cette fois, c'est l'actualité qui inspire ce billet cinématographique. En effet, la mort du "cher" leader Kim Jong-il remet la Corée au devant d'une actualité internationale toujours dense. Ce pays est encore aujourd'hui l'une des victimes collatérales de l'opposition bipolaire entre occident et communisme. Comme l'Allemagne, il subit la partition à hauteur du 38ème parallèle en 1953, à l'issue d'une guerre fratricide. Alors que l'Allemagne connaissait la réunification en 1990, la Corée du Nord persiste, avec l'appui de la Chine, dans la voix d'un communisme forcené et montre régulièrement les dents à une Corée du Sud pas forcément moins agressive soutenue par les Etats-Unis. Plusieurs films ont traité de la guerre de Corée - Baïonnettes au canon, Côte 465, Les ailes de l'espérance ou encore la série U.S. M.A.S.H. - mais la plupart avec une vision occidentale ou plus précisément hollywoodienne. Frères de Sang - Taegukgi sorti en 2004 fait donc figure de quasi exception car c'est un des rares films coréens parlant de la guerre civile et ayant connu une vraie carrière internationale.


Le fil conducteur du film repose sur l'histoire de deux frères, l'aîné travaillant durement pour envoyer son cadet à l'université. Tout est remis en cause lorsque la guerre éclate entre les deux Corées le 25 juin 1950 et que le plus jeune est enrôlé de force. Son frère qui tente de faire annuler sa réquisition subi alors le même sort. La caméra suit l'évolution des deux frères au milieu d'un conflit qui les dépasse totalement.


Film le plus cher du cinéma coréen à sa sortie avec un budget de plus de 12 millions de dollars, Frères de Sang est assurément du grand spectacle. Avec près de 25000 figurants, de gros efforts pour reconstituer le plus fidèlement possible les équipements militaires et des effets  spéciaux de qualité, certaines scènes de combat sont d'une rare efficacité. Le réalisateur, Kang Je-gyu, a fait le choix du réalisme en reprenant les nouveaux codes du genre initiés par le film de Spielberg, "il faut sauver le soldat Ryan". Et c'est vrai que les analogies sont nombreuses ce qui pour certains critiques s'apparente à du plagiat. Néanmoins, la spécificité historique donne tout son intérêt à cette œuvre. On suit l'entrée en guerre de la Corée du Sud manquant totalement de préparation ce qui amène les armées du Nord aux portes de Séoul avant que les Etats-Unis décident d'entrer en action afin d'éviter l'"effet domino" communiste. La Corée du Sud reprend le dessus et franchit à son tour la frontière du Nord jusqu'à ce que la Chine entre à son tour dans la danse rééquilibrant ainsi les forces en présence. Il n'y a pas de vrai parti pris ni aucune complaisance non plus dans l'évocation du comportement des combattans - et des non-combattants - du Nord comme du Sud. Parfois manichéen, souvent perturbant, le film manque parfois d'un peu de finesse mais il parvient à éclairer les traumatismes toujours vivaces engendrés par ce conflit dont le résultat perdure aujourd'hui avec la scission de la Corée depuis 1953.



Frères de Sang - Taegukgi* (2004) de Kang Je-gyu avec Jang Dong-gun et Won Bin; durée: 147 mn DVD Universal
* drapeau national Sud-Coréen

N.B.: N'hésitez pas à laisser vos commentaires, d'accord pas d'accord, afin que chacun puisse se faire une idée et choisir de regarder...ou non

dimanche 18 décembre 2011

filmographie indispensable: Warriors, l'impossible mission (1999)

Les fêtes de fin d'année et les vacances qui les accompagnent éventuellement permettront à certains d'entre vous de prendre du temps pour se divertir. Un bon DVD pourrait vous y aider. Je vous recommande donc de regarder ce téléfilm britannique: Warriors, l'impossible mission. Au vu de mes centres d'intérêt, vous aurez rapidement compris qu'il ne s'agit pas de la mission qui incombe au père Noël chaque année, la nuit du 24 au 25 décembre. En effet, le sujet est bien plus grave mais la qualité et la pertinence de ce film méritent d'être soulignés.



Liverpool 1992, l'armée britannique rappelle ses soldats permissionnaires pour les envoyer en Bosnie sous l'égide des Nations-Unies. Leur mission est alors de protéger les populations civiles exposées aux coups des belligérants. Le téléfilm suit principalement trois soldats d'une même unité, un homme du rang et deux lieutenants, confrontés à la réalité du déchirement yougoslave. Le réalisateur, Peter Kosminsky, montre avec beaucoup de réalisme la complexité de cette mission d'interposition et les états d'âme qu'elle engendre, difficile, en effet, pour ces soldats professionnels de porter secours aux populations sans prendre partie dans le conflit. Entraîner pour faire la guerre, ils s'engagent dans une opération humanitaire qui les exposent sans qu'ils puissent répondre librement.

IFV Warriors donne son nom au téléfilm, crédit inconnu

Tourner avec un style proche du documentaire, le film dépeint avec un grand réalisme les difficultés rencontrées par l'armée britannique en Bosnie et l'usure de ses soldats qui enchaînèrent Ex-Yougoslavie et l'Irlande du Nord, encore extrêmement agitée au début des années 90.
A ce titre, l'évolution du lieutenant Feeley (Ioan Gruffudd) au cours de ce téléfilm rend très concret le conflit entre l'éthique  et la mission qu'on lui a donné, comme l'a sans doute vécu le général Morillon à Srebrenica. Aiguillon de la réflexion déontologique, ce programme peut sans aucun doute être diffusé dans le cadre de la formation des jeunes officiers. Ces derniers ont ainsi l'occasion de réfléchir sur ce qu'ils feraient dans pareil cas sans avoir le stress lié au conflit.




Accompagné en bonus d'un extrait du dessous des cartes, le DVD permet, de plus, de comprendre comment la Yougoslavie de Tito s'est disloquée et rappelle combien la guerre fut intense et meurtrière si près de nous il y a près de 20 ans déjà.
Indispensable donc!
 
 
Warriors l'impossible mission (1999) de Peter Kosminsky avec Ioan Gruffudd, Matthew MacFadyen, Damien Lewis, Tom Ward durée: 171 min DVD BBC aux Editions Montparnasse.

samedi 10 décembre 2011

BPC: le couteau suisse de la Marine Nationale

Sea Power

Lorsque l'amiral Alfred Thayer Mahan (1840 - 1914)  a voulu comprendre ce qui faisait la puissance du Royaume-Uni, il en a déduit que le leadership mondial passait par la maîtrise des mers pour pouvoir commercer en temps de paix et en assurer le contrôle en temps de guerre. Ses réflexions sur le "sea power" influencent grandement la politique extérieure américaine qui se dote peu à peu d'une marine puissante. Héritière de cette pensée, la thalassocratie américaine continue de dominer les océans conservant ainsi une longueur d'avance sur la Chine dont les capacités de projection maritimes lui interdisent encore - mais pour combien de temps? - de prétendre au même rang de puissance militaire. 


Multi-pass

Au regard de ce concept géopolitique, la France, bien que ne disposant pas des moyens américains, a su développer un outil particulièrement efficient: le BPC bâtiment de projection et de commandement. Produit conjointement par DCNS et STX France - ex Chantiers de l'Atlantique - sur les chantiers navals de Saint-Nazaire, ce navire s'avère novateur par sa capacité multifonction. A partir d'une même plateforme, il peut être un porte-hélicoptère, un navire-hôpital de plus de cinquante lits, un transport de troupes, un moyen de mise en œuvre d'assaut amphibie et enfin un bâtiment de commandement. 
Cette modularité est indéniablement un atout. Elle offre, en effet, aux forces armées françaises la capacité de répondre à la majorité des problématiques actuelles, de la crise humanitaire à une crise plus conventionnelle nécessitant l'envoi d'un corps expéditionnaire pouvant être commander à partir du navire même.

BPC Mistral et hélicoptère TIGRE, crédit inconnu


Les deux premiers bateaux de ce type, le Mistral et le Tonnerre,  ont été mis en service respectivement en 2006 et 2007 et ils disposent d'ores et déjà d'une belle expérience opérationnelle. Le Mistral a ainsi participé à l'opération baliste en 2006 dès sa sortie de chantier. Il démontre rapidement sa pertinence en succèdant au Sirocco en tant que bâtiment de commandement et en évacuant plus de 1300 ressortissants. En 2008, il apporte un soutien humanitaire en Birmanie à la suite du cyclone Nargis. Enfin, cette année les deux BPC ont participé à la campagne lybienne - opération Harmattan - en permettant notamment le déploiement déterminant des hélicoptères de l'aviation légère de l'armée de terre.




La France qui dispose, pour l'heure, de deux BPC - le Mistral et le Tonnerre - a prévu d'en acquérir quatre, le Dixmude, devant être opérationnel courant 2012, assurera la mission de formation "Jeanne d'Arc"


Exportation?

Fonctionnel et semble-t-il doté d'un bon rapport qualité prix, le bâtiment de projection et de commandement pourrait être un succès à l'exportation au regard des besoins croissants de moyens de projection. Preuve de l'intérêt qu'il suscite, la Russie a signé un contrat pour quatre navires de ce genre dérogeant à ses habitudes de préférence nationale dans l'achat d'armement. Ce contrat a d'ailleurs créé une polémique au sein des pays de l'OTAN car certains voient d'un très mauvais œil le renforcement des capacités de projection des armées russes surtout à la suite de la guerre en Géorgie. L'amiral russe Vysotskiy avait d'ailleurs précisé qu' "un tel bateau aurait permis à la flotte de la Mer Noire d'envahir la Géorgie en quarante minutes au lieu de vingt-six heures".
A l'heure des interrogations sur la vente du Rafale à l'exportation et vu la capacité gauloise à l'autocritique dans ce domaine comme dans d'autres, il est important de noter que la France peut encore conduire des projets d'armement cohérents lui permettant pendant encore quelque temps d'être présent dans la résolution des crises internationales et de prétendre à une partie du "Sea Power" de l'amiral Mahan.

Pour suivre au mieux les problématiques maritimes et notamment les moyens de la Royale, je vous conseille la lecture du blog Le Fauteuil de Colbert  . Vous y trouverez notamment des informations bien plus détaillées et pertinentes sur les BPC, bonne lecture...

samedi 3 décembre 2011

Le réveil de l'ours russe

La fin de l'empire soviétique en décembre 1991 - il y a déjà 20 ans - a laissé la place à la seule super puissance américaine et entraîné l'hibernation forcée des rêves de puissance russe. Après quelques années de léthargie, la diplomatie russe semble s'être décomplexée lui permettant de retrouver un rôle dans les affaires du monde.

La descente aux enfers

Après le référendum de décembre 1991 où les Ukrainiens se déclaraient massivement favorables à l'indépendance - les Russes vivant en Ukraine compris - Mikhael Gorbatchev n'a pas eu d'autre choix que de constater la fin de l'empire construit par Lénine et Staline. Empétrée dans les difficultés économiques et la volonté d'indépendance de nombreuses régions de la fédération, la Russie est alors trop occupée à lutter pour sa survie pour penser à peser dans la diplomatie mondiale. Elle vit alors ce qu'elle considère longtemps comme une suite d'humiliation. En effet, libérés du joug soviétique, les pays d'Europe de l'Est se rapprochent massivement de l'occident en cherchant l'intégration au sein de l'Union Européenne ou en frappant à la porte de l'OTAN. Pour stopper l'hémorragie indépendantiste, la Russie de Boris Eltsine décide d'intervenir en Tchétchénie en 1994. Après un bombardement massif et la prise de la capitale Grozny, les troupes russes sont confrontées à une résistance féroce qui voit les rebelles tchétchènes reprendre la ville et entraîner le retrait russe en août 1996.


Grozny - crédit inconnu



Lorsque la crise yougoslave se transforme en guerre, la Russie ne peut empêcher l'intervention américaine qui condamne ses cousins slaves de Serbie. le schéma se reproduit en 1999 lors de la scission du Kosovo bien que cette fois les Russes montrent davantage de résistance en envoyant un contingent sur place et en suspendant sa coopération avec l'OTAN. Cela ne suffit pas à influer sur l'issue du conflit et la Serbie est une nouvelle fois contrainte par la communauté internationale de céder.

les premiers signes du réveil

l'arrivée de Vladimir Poutine coïncide avec les premiers sursauts de la puissance russe. En 1999, il décide d'intervenir à nouveau en Tchétchénie après plusieurs attentats. Bien que les forces russes connaissent à nouveau de grandes difficultés, elles parviennent à reprendre Grozny en février 2000. Dans cette opération, la Russie parvient à installer au pouvoir des hommes qui lui sont inféodés tel que Ramzan Kadirov sans se préoccuper des faibles remontrances internationales.
L'amélioration de la situation économique à partir de 1998 favorise la prise de parole russe. Forte de ses réserves gazières et pétrolières, la Russie dispose d'un avantage économique qui croit au même rythme que le besoin de ces matières premières. cela fait dire à M. Poutine que Gazprom est un puissant levier d'influence économique et politique sur les autres pays. Il n'hésite d'ailleurs pas à utiliser cette force dans ses relations avec l'Ukraine mais aussi l'Europe qui dépend largement des exportations russes.

Désinhibition et retour au statut de superpuissance?

2008 marque le tournant géostratégique pour la Russie. L'Ukraine et la Géorgie cherche alors à rejoindre l'OTAN et les Etats-Unis ne tentent pas de les en dissuader. Les Russes, estimant que le cas de ces pays ne pouvait être le même que la Pologne ou l'Estonie, préviennent qu'ils ne laisseront pas ces adhésions se faire. Après plusieurs esclandres diplomatiques, la Russie décide d'intervenir militairement en Géorgie prétextant de protéger ses citoyens abkhazes et Sud-Ossètes. Après quatre jours d'intervention, Medvedev, estimant les objectifs atteints, stoppe l'armée. Il décide de la laisser sur place pour garantir la paix. Cette opération est un signal fort lancé aux occidentaux: la Russie peut à nouveau dire non et faire respecter son avis.


crédit: deesillustration.com
 
Après avoir fait sauter un verrou psychologique, la Russie cherche à trouver sa puissance d'antan. Pour cela, elle fait le choix de moderniser sa défense et à s'équiper d'outils de projection tels que les quatre BPC de type Mistral commandés à la France. Cela doit l'aider à faire valoir ce qu'elle considère comme ses droits, notamment dans l'Arctique où les réserves en matière première entraînent d'ores et déjà un accroissement des tensions. Le gouvernement russe n'hésite d'ailleurs plus à montrer sa force comme le montre les différentes annoncent militaires autour de cet enjeu - création de deux brigades pour l'Arctique, nouveaux sous-marins, modernisation des brise-glaces, etc.
La gestion de la crise en Syrie est un autre exemple de la diplomatie décomplexée russe. Opposée à une quelconque intervention occidentale, elle joue de son véto au conseil de sécurité à l'ONU pour l'empêcher. Et pour appuyer cette position, la Russie a décidé de l'envoi d'un groupe aéronaval envoyant ainsi un nouveau signal fort.
Enfin, face à la volonté américaine persistante de créer un bouclier anti-missiles en Europe, la Russie menace de répondre par la mise en place d'un système propre, comme aux plus belles heures de la guerre froide.


BPC Mistral - crédit: Theatrum Belli


Pendant que les Etats-Unis connaissent un déclin relatif de leur domination géopolitique comme l'écrit Stéphane Taillat , la Russie affirme ses positions et s'inscrit comme prétendant au statut de super puissance. Signe - anecdotique? - de son poids géopolitique croissant, 50 000 serbes du Kosovo ont fait une demande pour obtenir la nationalité russe. Ils considèrent en effet que seule la Russie peut dorénavant leur permettre d'atteindre leur revendication face aux occidentaux.